Le destin d’une fille-mère au 18ème siècle

export(1)Même si nous savons ce qu’en pensaient l’église et la population, nous n’imaginons pas forcément bien comment était la vie des filles-mères sous l’Ancien Régime.

Des recherches sur une ancêtre m’ont récemment permis de réaliser toute la difficulté de cette situation. J’ai en effet pu retrouver sa déclaration de grossesse, ce qui m’a permis d’en apprendre plus sur sa vie et les circonstances qui l’ont menée à cette situation.

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Cette histoire se déroule en 1737 au Vaurouy, petit village des boucles de la Seine. Marguerite Marc, âgée de 23 ans, est engagée comme servante chez un seigneur local. Très vite, un certain Jean Grandsire, valet du même seigneur, commence à lui faire des avances.

Voici un extrait de l’histoire racontée par Marguerite dans sa déclaration de grossesse faite devant la juridiction de la Haute Justice du Vaurouy en décembre 1737.

« Le dit Grand Cire n’a cessé de la solliciter pour lui accorder sa compagnie contre lesquelles sollicitations elle n’a pu tenir et a enfin eu le malheur de succomber au jour qu’elle est devenue grosse des œuvres du dit Grand Cire duquel elle a eu la compagnie pour la première fois dans la fin du Carême dernier qu’il coucha avec elle et passa une nuit entière dans le lit [où] elle était lors couchée avec l’autre servante nommée Marie qu’elle ne croit point s’être aperçue de ce qu’il se passa entre elle et le dit Grand Cire […] Elle nous assure ne s’être abandonnée à lui qu’après une infinité de promesse de l’épouser et par des serments si souvent réitérés qu’elle n’en a douté que depuis qu’il a eu la témérité de l’abandonner. »

Quelques mois plus tard, Marguerite accouche d’un petit garçon qui transmettra le nom de Grandsire à ses descendants, sans avoir connu son père.

Cette histoire, et l’apparente naïveté de Marguerite, peuvent certes prêter à sourire de nos jours, mais elles nous rappellent une triste réalité de l’époque. En effet, la conception d’un enfant hors-mariage étant alors très mal vue, beaucoup de jeunes filles tentaient de cacher leur grossesse, d’accoucher seules (au risque de leur vie) et de se débarrasser de l’enfant pour ne pas finir aux bans de la société.

Afin d’éviter ces nombreux infanticides, Henri II rendit obligatoires les déclarations de grossesse par un édit de 1556. Une jeune fille qui ne faisait pas cette déclaration pouvait encourir la peine de mort. Bien sûr, une fois l’enfant né, la vie de ces filles-mères ne s’améliorait pas pour autant, car il leur était difficile de trouver un homme qui accepte de les épouser.

J’ai voulu en savoir plus sur le destin de mon ancêtre Marguerite Marc suite à la naissance de son fils. Et curieusement, c’est en cherchant des informations sur le père biologique de l’enfant (le valet Jean Grandsire) que j’ai pu retrouver la trace de Marguerite.

En effet, en fin d’année 1738, Jean Grandsire publie ses bans pour se marier avec une autre femme. Marguerite Marc s’oppose alors au mariage et celui-ci est ajourné, le temps que son opposition soit étudiée.

Toutefois, la mainlevée d’opposition est confirmée par le Parlement de Rouen le 23 décembre 1738 et le mariage est contracté dès le mois de janvier 1739.

Mariage-Jean-Grandsire-Blacqueville-1739

Extrait de l’acte de mariage de Jean Grandsire à Blacqueville (source : AD76)

Ce qui m’attriste en lisant cet acte, c’est de voir que l’opposition formulée par mon ancêtre Marguerite Marc n’a pas compté. Elle aura juste repoussé le mariage de quelques jours… sans aucune autre conséquence.

Quant à la suite de la vie de Marguerite Marc, mes recherches m’ont permis d’être un peu rassurée : j’ai retrouvé deux ans plus tard, dans une autre paroisse, son acte de mariage avec un dénommé Nicolas Michel. Ce mariage me permet de plus d’expliquer pourquoi le fils de Marguerite était parfois nommé Jean Baptiste Michel Grandsire, alors que le prénom Michel n’apparaissait pas sur son acte de naissance.

Si je suis quelque peu rassurée sur le sort de mon ancêtre, cette recherche montre cependant toutes les difficultés auxquelles étaient confrontées les filles-mères sous l’ancien régime, notamment les peines qu’elles encouraient si elles ne déclaraient pas leur grossesse et la difficulté à faire entendre leurs droits vis-à-vis du père de l’enfant.

Elise

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