Devenir sage-femme au XIXème siècle

Tableau - Sage-femmePour retracer la vie des femmes de notre généalogie, quelques métiers sortent du lot, et permettent de retrouver des archives concernant nos ancêtres. Le métier de sage-femme est de ceux-là, en particulier au XIXème siècle.

En effet, à partir du début du XIXème siècle, il était nécessaire d’avoir reçu une instruction et d’avoir obtenu un diplôme pour exercer le métier de sage-femme et pouvoir procéder à des accouchements.

L’une de mes ancêtres, Catherine Michelet, a été sage-femme entre 1840 et 1880, dans le village de Pierrepont (qui se trouvait alors en Moselle, mais désormais en Meurthe-et-Moselle). J’ai donc voulu en savoir plus sur son parcours : comment est-elle devenue sage-femme, où a-t-elle appris son métier, et dans quelles conditions ?

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Comment est-elle devenue sage-femme ?

Catherine Michelet n’a pas toujours été sage-femme. En effet, lors de son mariage avec son premier mari, Jean Pierre Delatte, elle était couturière. Elle l’était encore lors des naissances de chacun de leurs enfants. Mais elle s’est retrouvée veuve très jeune : le 9 avril 1838, son mari décède, la laissant seule avec 3 jeunes enfants à charge (3 garçons âgés de 1 à 5 ans). Elle même n’a alors même pas 30 ans.

Plusieurs années plus tard, en 1851, Catherine Michelet se remarie et exerce alors la profession de sage-femme.

Il est donc très probable qu’elle ait entrepris de devenir sage-femme suite au décès de son premier mari afin de subvenir aux besoins de sa famille. Cela semble d’ailleurs confirmé par le fait qu’on la retrouve comme sage-femme dans les registres d’état civil de Pierrepont dès 1840, où elle déclare la naissance d’un enfant naturel qu’elle vient de mettre au monde.

Selon ces informations, Catherine Michelet aurait donc certainement suivi une formation de sage-femme entre 1838 et 1840.

Comment étaient formées les sages-femmes ?

Les formations pour devenir sages-femmes étaient assez différentes d’un département à l’autre, et aussi selon les époques. Dans certains départements il existait des écoles ou des cours d’accouchement. Mais dans les départements où il n’existait pas de cours, les élèves étaient souvent envoyées à Paris pour apprendre le métier.

A l’époque où Catherine Michelet a pu être formée, il existait encore une Ecole Pratique d’Accouchement, dans le département de la Moselle : à Metz (cette école a fermé en 1850 et les élèves mosellanes ont ensuite été obligées d’aller étudier à Paris ou Strasbourg). Cette école avait été fondée par Pierre Etienne Morlanne, un chirurgien spécialisé en obstétrique qui formait des sages-femmes depuis 1798.

J’ai retrouvé, aux Archives Départementales de Moselle (en série H-dépôt), des documents concernant l’Hospice de la Maternité de Metz qui m’ont permis de retracer le parcours d’élève sage-femme de mon aïeule, et de mieux connaître les conditions d’enseignement du métier de sage-femme à Metz.

La première découverte était que mon ancêtre figurait effectivement sur la liste des élèves de l’école d’accouchement pour l’année scolaire 1838-1839 (sous le nom « dame Delatte »).

Liste des élèves admises à l'école d'accouchement pour l'année 1838-1839

Liste des élèves admises à l’école d’accouchement pour l’année 1838-1839 (source : AD Moselle – cote 1 HD 7 K 1)

Quelles étaient les conditions d’admission à l’école d’accouchement ?

L’Ecole Pratique d’Accouchement de Metz accueillait en particulier des élèves boursières dont les études étaient payées par le département. Chaque année, 8 élèves venant des différents arrondissements de Moselle étaient admises dans l’école.

Les conditions d’admission étaient les suivantes :

  • être âgée d’au moins 19 ans et au plus 30 ans ;
  • savoir lire et écrire ;
  • fournir un certificat de bonne conduite délivré par le maire de sa commune ;
  • fournir un certificat du médecin constatant que l’aspirante est de bonne constitution et qu’elle peut exercer le métier de sage-femme ;
  • justifier qu’elle est hors d’état de payer elle-même son instruction.

Après avoir fait leur demande de bourse, les aspirantes devaient passer un examen auprès de la sous-préfecture de leur arrondissement pour s’assurer qu’elles avaient les compétences requises pour suivre les études de sage-femme : en particulier qu’elles savaient bien lire et écrire et qu’elles étaient aptes à apprendre le métier. L’année scolaire démarrant au 1er novembre, ces examens avaient lieu dans le courant du mois d’octobre.

Toutefois pour mon aïeule, tout semble ne pas s’être déroulé comme prévu. Une lettre du docteur Morlanne datée du 17 octobre 1838 indique que Catherine Michelet n’a pas pu se présenter à l’examen d’admission. En effet, quelques jours plus tôt, elle a fait une chute et s’est fracturé l’avant-bras. Il estime donc qu’elle ne sera sûrement pas en mesure d’exercer le métier de sage-femme.

Mais 10 jours plus tard, une nouvelle lettre indique que Catherine Michelet s’est finalement présentée à Metz pour l’examen d’admission, et qu’elle a les compétences requises (« elle sait bien lire et passablement écrire »). Son admission doit néanmoins être différée car son bras n’est pas encore remis (elle ne peut pas s’habiller seule, ni veiller, et pourrait donc difficilement suivre les enseignements). Elle sera donc admise au 1er janvier suivant et recevra des leçons particulières pour rattraper son retard.

Lettre du docteur Morlanne concernant l'admission de Catherine Michelet, veuve Delatte

Lettre du docteur Morlanne concernant l’admission de Catherine Michelet, veuve Delatte (source : AD Moselle – cote 1 HD 7 K 1)

Comment se déroulaient les cours à l’école d’accouchement ?

C’est donc le 1er janvier 1839, deux mois après ses camarades, que Catherine Michelet commence à suivre les cours de l’école d’accouchement.

Les cours suivis par les sages-femmes étaient nombreux et autant pratiques que théoriques. Ils portaient en particulier sur :

  • l’anatomie et la physiologie des femmes ;
  • l’hygiène des femmes enceintes et des nouveau-nés ;
  • les maladies pouvant affecter les femmes en couches ;
  • les différents types de grossesse ;
  • les accidents pouvant survenir lors des accouchements, etc.

Les cours théoriques se déroulaient chaque jour dans les locaux tenus par les Sœurs de la Charité Maternelle, chez qui les élèves étaient hébergées. Par manque de salles, les cours avaient lieu dans le dortoir même où les élèves dormaient (à deux par lit) et mangeaient.

Les apprentissages pratiques se déroulaient quant à eux au sein de la Maison de Santé fondée par le docteur Morlanne, qui accueillait de nombreuses filles-mères. Les élèves y pratiquaient des accouchements et des saignées. Elles accompagnaient également la maîtresse sage-femme lorsque celle-ci allait procéder à des accouchements chez des filles-mères en dehors de la Maison de Santé.

Emplacement de la Maison de Santé et Maternité de Metz, au 36 rue Mazelle

Emplacement de la Maison de Santé et Maternité de Metz, au 36 rue Mazelle (source : Gallica/BNF)

Comment obtenaient-elles le diplôme de sage-femme ?

L’année scolaire se terminait en août. A la fin des cours, les élèves passaient un examen dans l’école pour obtenir un certificat de capacité. Elles se présentaient ensuite devant le jury médical du département pour obtenir le diplôme de sage-femme leur permettant d’exercer.

Compte tenu de son arrivée tardive dans l’école, Catherine Michelet ne s’est pas présentée devant le jury médical en même temps que les autres élèves de sa promotion. Selon une lettre du directeur, il fallait qu’elle suive des cours pendant encore 7 mois. Elle a donc certainement reçu son diplôme de sage-femme vers le début de l’année 1840, mais il n’y avait pas d’information plus précise à ce sujet dans les archives de l’Hospice.

Toutefois, il est certain qu’elle a été diplômée avant juin 1840, date à laquelle elle apparait dans les registres d’état civil de sa commune comme sage-femme.

Par ailleurs, selon la loi du 19 ventôse an XI, les sages-femmes devaient faire enregistrer leur diplôme au Tribunal de Première Instance de l’arrondissement où elles étaient établies. Pour connaître la date exacte de son diplôme, je pourrai donc rechercher une trace de cet enregistrement dans les archives judiciaires de l’arrondissement de Briey (mais cela sera cette fois aux Archives Départementales de la Meurthe-et-Moselle).

Je ne connais pas encore tout le parcours de mon ancêtre en tant que sage-femme (en particulier le déroulement de sa carrière). Pour cela, il faudra que je poursuive les recherches dans les séries M, T, X et H-dépôt en particulier dans lesquelles on retrouve des traces des sages-femmes. Mais ces recherches m’ont déjà permis de mettre en lumière tout un pan de la vie de mon aïeule et de me rendre compte des sacrifices qu’elle a faits pour élever ses enfants suite au décès de son mari.

Et vous, avez-vous des ancêtres sages-femmes ? Connaissez-vous leur parcours ?

Elise

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