Retracer le parcours d’un soldat de Napoléon

De 1792 à 1815, la France a connu de nombreuses guerres.

D’abord, il y a eu les guerres de la Révolution, et ensuite, les campagnes napoléoniennes du Premier Empire.

Durant cette période, la conscription obligatoire a été mise en place, et beaucoup d’hommes ont eu à servir dans l’armée.

J’ai retracé le parcours de plusieurs de mes ancêtres qui ont été alors mobilisés comme soldats.

Aujourd’hui, je souhaite partager avec vous le parcours de mon ancêtre Jean-François Martin, soldat de Napoléon.

Jean François Martin est né le 21 novembre 1776, à Aulnois-sous-Vertuzey dans la Meuse.

Lorsque la loi Jourdan met en place la conscription militaire obligatoire en 1798, il a déjà presque 22 ans.

Cette loi stipule que tous les hommes sont soumis à la conscription militaire l’année de leurs 20 ans.

Comme Jean François Martin a déjà 22 ans, on pourrait penser qu’il n’est pas concerné, mais, ce n’est pas le cas.

En effet, lors de son introduction, en 1798, la loi Jourdan est « rétroactive » : elle concerne alors « tous les Français depuis l’âge de 20 ans accomplis jusqu’à celui de 25 ans révolus ».

Jean François Martin est donc inscrit dans son canton comme conscrit de 2e classe (c’est-à-dire, les jeunes hommes âgés de 21 à 22 ans).

Le 12 juin 1799, il est appelé à rejoindre la 11e demi-brigade d’infanterie légère, comme chasseur.
A cette époque, la 11ème demi-brigade d’infanterie légère vient de s’installer en garnison à Mannheim, en Allemagne, dans le cadre des guerres de la Deuxième Coalition.

Remarque : Les Guerres de Coalitions sont les guerres durant lesquelles différents pays d’Europe formèrent des alliances (des coalitions) pour combattre la France révolutionnaire, puis la France Impériale. En tout, il y a eu 7 Guerres de Coalition.

Jean François Martin est affecté au 3e bataillon, qui est le bataillon de garnison. De ce fait, il reste dans un premier temps à Mannheim, pendant que le reste du régiment participe au combat d’Offenbourg (également en Allemagne).

Par la suite, son bataillon est réuni avec la demi-brigade, pour participer à différents combats, en Allemagne, contre l’armée autrichienne.

Au cours des combats, en octobre 1799, la 11ème demi-brigade d’infanterie légère est forcée de se replier sur Mannheim, et elle est alors rattachée à l’Armée de Batavie. (La Batavie, ou République Batave, est le nom des Pays-Bas de 1795 à 1806).

Le but de l’Armée de Batavie est alors de contrer l’invasion de la Hollande par les Britanniques et par les Russes.

Toutefois, le jour même où la demi-brigade de Jean François Martin rejoint cette armée, la Convention d’Alkmaar, qui met fin aux combats en Hollande, est signée.

De novembre 1799 à juillet 1800, Jean François et sa demi-brigade ne participent donc à aucun combat.

Au cours de ces 9 mois, ils sont stationnés sur l’arrière, notamment : au Luxembourg, à Bitche (en Moselle), à Givet (dans les Ardennes), et enfin à Bruges (en Belgique).

A l’automne 1800, les soldats de la 11ème demi-brigade sont de nouveau envoyés en Allemagne, et, le 18 décembre, ils prennent part à leur dernier combat important, à Fischbach, près de Nuremberg.

Par la suite, en février 1801, le traité de Lunéville met fin aux guerres de la Deuxième Coalition et ouvre une période de paix.

C’est probablement au cours de cette période que Jean François Martin quitte son régiment. En effet, le 19 juin 1801, il est rayé des contrôles de troupes de sa demi-brigade pour désertion.

Registres de contrôles de troupes de la 11e demi-brigade d’infanterie légère

Je ne sais pas exactement quel a été son parcours durant ces quelques mois, mais, il semble qu’il rentre alors chez lui pour se marier.

En effet, le 26 août 1801, il épouse Marie Anne Leclerc à Aulnois-sous-Vertuzey.

A peine plus de 9 mois plus tard, le 17 mai 1802, Marie Anne Leclerc donne naissance à une petite fille.

On pourrait croire que le parcours militaire de Jean François Martin s’arrête là, et qu’après avoir déserté son régiment, il a repris sa vie comme manœuvre dans son village natal.

Mais, ce n’est pas le cas.

En effet, lorsque son second enfant (mon ancêtre Benoit Martin) nait en août 1805, la naissance est déclarée par une sage-femme. L’acte de naissance nous apprend que Jean François Martin est « absent, étant au service de l’Empereur des Français ».

J’ai donc repris les recherches dans les archives militaires, et j’ai retrouvé sa trace, dans la 13e demi-brigade d’infanterie de ligne.

En effet, d’après les registres de contrôle de troupes, il rejoint cette demi-brigade, comme fusilier, le 30 juillet 1802, soit quelques mois après la naissance de sa première fille.

Les mêmes registres nous apprennent également que Jean-François mesure 1m63, qu’il est châtain aux yeux « roux », et qu’il a le visage ovale, le front couvert, le nez ordinaire, la bouche moyenne, et le menton « fourchu ».

Registres de contrôles de troupes de la 13e demi-brigade d‘infanterie

Quand Jean-François rejoint sa demi-brigade, celle-ci est alors en garnison à Metz (en Moselle) depuis quelques mois.

En effet, la 13ème demi-brigade (qui devient par la suite le 13ème Régiment d’Infanterie) fait partie de la réserve du camp de Metz.

Etant marié et père de famille, Jean François Martin a probablement obtenu des permissions pour revenir chez lui pendant cette période.

Son village n’est en effet qu’à une soixantaine de kilomètres de Metz. C’est donc probablement ainsi qu’il a pu concevoir son fils né en août 1805.

Fin septembre 1805, le 13ème Régiment d’Infanterie est appelé à se rendre à Turin pour rejoindre l’Armée d’Italie. C’est en effet le début de la Campagne d’Italie, lors des guerres de la Troisième Coalition.

C’est la première des 5 campagnes auxquelles Jean François Martin participe avec le 13ème Régiment d’Infanterie. En effet, les registres de contrôle de troupes nous apprennent qu’il a participé :

• en 1805, à la campagne d’Italie,
• en 1806, à la campagne d’Istrie (dans l’Adriatique),
• en 1807, à une campagne dans le Frioul (dans le nord-est de l’Italie),
• en 1809, aux campagnes d’Italie et d’Allemagne.

Pendant 4 ans, Jean François Martin prend donc part à différents combats dans le nord de l’Italie et sur la côte adriatique.

Jean François Martin n’est officiellement rayé des contrôles de troupes du 13e Régiment d’Infanterie qu’en 1815. Cependant, il a probablement été en congé avant cette date.

En effet, il ne participe à aucune campagne après celle d’Allemagne en 1809. Par ailleurs, il est présent dans son village, en 1810 et 1812, lors des naissances de ses filles.

Après cela, il reste comme manœuvre à Aulnois-sous-Vertuzey jusqu’au décès de sa femme en 1821.

Quelques mois plus tard, il se remarie dans le village voisin d’Euville, où il s’établit avec sa nouvelle épouse. Il y travaille notamment comme carrier dans les carrières d’Euville (qui étaient très importantes à l’époque).

Enfin, il passe ensuite les derniers mois de sa vie à Paris, où il décède en 1857.

Voici qui conclut le parcours de mon ancêtre Jean François Martin, soldat des guerres napoléoniennes.

Et vous, avez-vous des ancêtres qui ont été mobilisés pendant les guerres de la Révolution ou les campagnes napoléoniennes ? Avez-vous déjà essayé de retracer leur parcours ?

Elise