Enquête généalogique dans les dossiers d’officiers et les contrôles de troupes
Lorsque l’on souhaite faire des recherches sur un ancêtre officier, la meilleure chose à faire est de se rendre au Service Historique de la Défense pour retrouver son dossier et le consulter. Ce dossier constitue généralement l’aboutissement de la recherche : les documents qui le constituent permettent de reconstituer son parcours, et donnent des informations plus précises que tous les registres collectifs que nous pourrions être amenés à consulter.
Toutefois, dans certains cas, le dossier individuel constitue seulement le premier morceau d’un grand puzzle pour reconstituer le parcours d’un officier.
Cela a été le cas pour mon ancêtre Jacques Pierrard.
Jacques Pierrard est né à Carignan, dans les Ardennes, en 1749. Il s’y est marié une première fois en 1777, une seconde fois en 1804 et y est décédé en 1814. Sur tous ses actes, il est mentionné comme tonnelier, sauf lors de son second mariage où il est qualifié d’officier pensionné.
N’en sachant pas plus sur son parcours, et les régiments dans lesquels il a pu servir, ma seule chance est de retrouver un dossier à son nom au Service Historique de la Défense.
1er morceau du puzzle : un dossier d’officier
Le Service Historique de la Défense de Vincennes conserve en effet les dossiers d’officiers ainsi que les dossiers de pensions. J’ai donc de bonnes chances d’y trouver un dossier concernant mon ancêtre. En consultant les inventaires des dossiers d’officiers, je trouve effectivement un dossier qui peut correspondre, malgré quelques différences : le prénom n’est pas le bon (Joseph au lieu de Jacques) et il y a un écart de 2 ans sur l’année de naissance, mais le lieu de naissance correspond.
En commandant ce dossier, j’imagine que les informations qu’il contient me permettront de confirmer s’il s’agit, ou non, de mon ancêtre.
Malheureusement, les informations d’état civil contenues dans le dossier ne sont pas plus précises que celles qui ont été retranscrites dans les inventaires. Le dossier en lui-même ne contient d’ailleurs que peu d’informations puisqu’il est constitué d’une unique feuille : une proposition de nomination à un emploi de sous-lieutenant datée du 24 thermidor an III (soit le 11 août 1795).
Cette feuille donne toutefois des informations très intéressantes sur l’officier : ses états de service depuis son engagement comme simple soldat en 1769 jusqu’à son grade de sous-lieutenant en 1795.
Pourtant, aussi intéressantes qu’elles soient, les informations contenues dans ce dossier ne me permettent toujours pas de déterminer s’il s’agit bien de mon ancêtre.
Le morceau de puzzle est-il compatible avec la ligne de vie de mon ancêtre ?
Pour avoir les idées plus claires à ce sujet, j’ai donc commencé par mettre en parallèle la ligne de vie de mon ancêtre avec les états de service de l’officier afin de voir si les différents évènements sont compatibles.
Le résultat est plutôt encourageant : le premier mariage de Jacques Pierrard a lieu juste après le retour de l’armée de l’officier, et ses enfants naissent en dehors de ses périodes dans l’armée. Mais, cela ne reste qu’une forte présomption et ne suffit pas à prouver que le dossier consulté est bien celui de mon ancêtre.
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Pour aller plus loin, il me faudrait en savoir plus sur l’identité de cet officier. Or, j’ai déjà consulté son dossier individuel : quoi de mieux pour trouver des informations précises sur un officier ?
Le dossier d’officier constitue en effet généralement la meilleure source pour retracer la carrière d’un officier. Mais il existe au SHD d’autres ressources nominatives permettant de retrouver des informations sur un militaire, à l’image des contrôles de troupes.
2ème morceau de puzzle : les contrôles de troupes
Or, avant d’être officier, Joseph Pierrard était un simple soldat, et je sais, par ses états de service, qu’il a servi pendant de longues années dans le 42ème Régiment (qui s’appelait alors Régiment de Limousin). Je devrais donc pouvoir trouver sa trace dans les contrôles de troupes qui couvrent sa période de service.
A lire également : Recherches dans les contrôles de troupes au SHD
Comme espéré, je retrouve bien un soldat du nom de Pierrard dans les contrôles de troupes du Régiment de Limousin. Et cette fois-ci, bonne surprise, il est bien prénommé Jacques, comme mon ancêtre. De plus, ses parents et sa profession sont mentionnés et ne laissent aucun doute possible : il s’agit bien de mon ancêtre Jacques Pierrard.
Par ailleurs, ce registre me permet d’obtenir des informations beaucoup plus précises sur mon ancêtre que ce qui figurait dans son dossier d’officier. J’y découvre sa taille plutôt grande (5 pieds 7 pouces 2, ce qui, sauf erreur de ma part, correspond à environ 1 m 82) et sa description physique (visage rond vermeil, […], front bien fait, nez aquilin, yeux bruns un peu louches, cheveux et sourcils châtains).
Ainsi, grâce à ces contrôles de troupes, les morceaux du puzzle s’assemblent : les états de service trouvés dans le dossier d’officier sont bien ceux de mon ancêtre, et je découvre ainsi tout un pan de sa vie.
Les pièces manquantes du puzzle
Pour compléter encore le puzzle et reconstituer le parcours de mon ancêtre, je vais maintenant pouvoir me pencher sur des documents encore plus généraux : les historiques régimentaires. Ceux-ci vont me permettre de découvrir tous les lieux de passage de la vie de mon ancêtre et les batailles auxquelles il a pu participer.
Cette recherche m’a d’ores et déjà permis de découvrir la vie de mon ancêtre sous un tout nouvel angle : si je m’en tenais à sa ligne de vie, j’aurais pu croire qu’il n’avait jamais quitté Carignan (il y est né, s’y est marié deux fois et y est mort). Mais j’ai découvert qu’il avait eu une longue carrière d’officier et qu’il avait notamment vécu à Toulon (où sa nomination comme officier a été signée) et à Ajaccio, où son régiment a été en garnison pendant près de 10 ans.
Ce que je retiens de cette recherche, c’est que le dossier individuel d’un ancêtre n’est pas toujours un aboutissement. S’il est incomplet et n’apporte pas beaucoup d’informations, des registres collectifs peuvent permettre de trouver des informations complémentaires et débloquer la situation. Si je m’étais arrêtée après avoir consulter le dossier d’officier, tout ce pan de l’histoire de mon ancêtre me serait resté inconnu.
Elise